Faire l’amour : contrainte ou escapade ?

A ceux qui pensent que le confinement favorise la sexualité, je demanderai d’abord laquelle,  l’assouvissement d’un besoin ou l’aboutissement d’une relation ? Je ne me lasserai jamais d’explorer cette différence majeure entre l’homme et la femme dans la sexualité du couple :  la proximité physique provoque la plupart du temps chez l’homme un besoin et un désir de rapprochement sexuel, désir naturel physiologiquement spontané. C’est pour cette raison que la femme accuse son compagnon, à tort bien entendu, d’être un « obsédé sexuel ». Pour elle, le désir n’est pas instantané. Il dépend d’une ambiance de bien-être, de légèreté, d’attentions, d’un certain romantisme, pour accéder à un échange sensuel enfin partageable. L’homme, alors, soupçonne sa compagne de frigidité, d’indifférence ou d’infidélité. Les deux sont victimes de fausses croyances qui émanent d’une ignorance entretenue par notre société. Quand l’homme est dans le désir la femme est dans le désir du désir. Ce décalage est trop rarement décrit et démontré. Notre conception de la sexualité humaine est loin de respecter notre capacité à enrichir et à embellir la sexualité du couple.   

A ceux et celles qui croient que la sexualité humaine est un besoin vital au même titre que manger ou dormir je réponds qu’il serait bon de dissocier la génitalité (sexualité de la reproduction), de l’érotisme (art de la sexualité). J’entends par érotisme la dimension humaine de la sexualité : savoir susciter et entretenir le désir du ou de la partenaire par des attentions préméditées ou improvisées, étonner, apprivoiser, jouer de l’intuition des gestes et des mots, faire preuve de délicatesse, mais aussi inventer et scénariser, bref, le contraire de la spontanéité physiologique et de la magie du temps de la passion. Le sexe et les mots entretiennent des rapports si contradictoires que lorsque le sexe se dit, il ne se fait pas, et lorsqu’il se fait il ne se dit pas. Une culture de la fusion dans le mariage et une éducation pitoyable dans le domaine de l’affectivité et de la sexualité dans le couple, perpétuent l’ignorance et la superstition mais aussi la licence et la perversion. On dit le sexe à mots couverts, ou on ne le dit pas du tout, ou on le dit mal. Nous employons l’expression « faire l’amour » dans le cadre de deux situations extrêmement différentes : le couple intensément amoureux au plus fort de la passion et le couple amicalement amoureux au plus loin dans la durée. Notre vocabulaire amoureux est bien pauvre qui nous fait mélanger les effets magiques de la passion et la nécessaire et passionnante fabrication du désir et du plaisir entre deux personnes qui souhaitent vivre ensemble longtemps. Les amalgames qui résultent de cette confusion des mots et des personnes sont lourds de conséquences pour le couple post-passion et bien souvent sources de violences. Le confinement quel qu’il soit est une contrainte, l’érotisme une escapade. Les deux sont incompatibles.

Les nouvelles attributions du couple multifonction
La bonne routine fait son retour sur la scène du couple

Laisser un commentaire